Restauration collective, pourquoi et comment s'atteler au changement ?
Aujourd’hui, on sait que la restauration collective hors domicile concerne en moyenne 1 repas sur 7 pris par les Français (à titre de comparaison, 1/4 au Royaume-Uni et presque ½ aux Etats-Unis), et touche des secteurs aussi cruciaux pour la santé et pour l’avenir que les secteurs hospitalier, scolaire, et universitaire. C’est donc un des axes majeurs du changement possible du point de vue de l’accès à une alimentation saine, tout en étant certainement l’un des plus complexes.
Une réalité qui s'inscrit dans un contexte sociétal
Si l’on observe la situation dans le domaine scolaire, son avènement est en effet la résultante d’un modèle de société lié à différents facteurs :
- l’organisation familiale dans son rapport au travail, et donc au contexte socio-économique,
- la prise en charge correspondante par les collectivités publiques,
- le changement d’échelle induit par la taille des établissements scolaires et par la massification des approvisionnements,
- et le modèle agricole et alimentaire dans lequel elle s’inscrit.
A cela se rajoute l’acceptabilité culturelle de la situation pour les familles : en effet, le questionnement sur ce qu’il y a dans l’assiette des enfants va de pair avec la façon dont est prise en considération l’alimentation en général. A l’heure où les circuits courts représentent une faible part des produits commercialisés, la grande distribution reste le système d’approvisionnement individuel majoritaire, ce qui a des effets induits de méconnaissance sur la saisonnalité, ou de banalisation de l’achat de produits transformés.
Des prises de conscience, des actions favorables au changement
Face à cela pourtant, les prises de conscience citoyennes croissent. Le film « Nos enfants nous accuseront » est à ce titre emblématique. Les commissions « menus » s’organisent dans les collèges et les lycées. Les politiques publiques aux différents niveaux œuvrent pour l’évolution des cantines pour aller dans le sens de l’introduction de plus de produits bio et ou locaux et de la réduction du gaspillage, avec notamment les formations des chefs de cuisine et des équipes, la sensibilisation des élèves.
Un système complexe impliquant une diversité d’acteurs
Le changement, pourtant, s’avère lent et ardu. Une hypothèse à cela est la complexité du système installé progressivement dans ce domaine, on pourrait même dire plutôt des systèmes.
En effet, à chaque niveau scolaire, correspond une collectivité, commune, département, région avec sur le même territoire, ses mécanismes d’approvisionnements et ses postures politiques, ce qui induit une coexistence en tuyaux d’orgue de circuits d’approvisionnement.
Chaque territoire est spécifique du point de vue de l’offre locale de production agricole quantitative et qualitative, et plus largement de filière alimentaire avec des intermédiaires transformateurs ou distributeurs.
Chaque établissement présente aussi des caractéristiques propres, en termes de taille, de contexte socio-économique des élèves, de contraintes financières. On connait aujourd’hui dans les établissements du secondaire le rôle déterminant du chef de cuisine quant aux évolutions possibles, si celles-ci sont soutenues par la direction.
Au sein de ce système d’acteurs complexe, les personnes qui s’impliquent ont un rôle déterminant : ici les élus qui, conscients des enjeux à long terme d’une alimentation saine, appuient les changements vers cela, là les agriculteurs qui s’impliquent sur leur territoire pour contribuer à approvisionner les cantines, ici les équipes de restauration qui aspirent à un changement, là les parents d’élèves qui participent aux réflexions et décisions, ici les élèves eux-mêmes qui se font les ambassadeurs auprès de leurs camarades pour relayer des messages, là les associations citoyennes diverses ou les documentaristes qui éclairent ces questionnements.
S’informer, se rencontrer, coopérer
Pour dépasser les vœux pieux dans ce domaine, nous ne pouvons que vous encourager à, d’abord vous informer précisément sur la situation à laquelle vous êtes confrontés pour en comprendre le fonctionnement, les contraintes et les leviers et, selon qui vous êtes, à rencontrer les différents autres acteurs concernés par l’organisation mise en place.
Ceci introduit tout naturellement l’exemple de la rencontre de Laon, organisée par ETS, dont nous vous parlons dans un autre article. Cette rencontre vise justement à ouvrir des nouvelles pistes de coopération entre agriculteurs et établissements scolaires et hospitaliers.
De plus, il existe aujourd’hui de nombreux outils méthodologiques pour vous permettre d’approfondir le sujet, nous en indiquons certains à la suite de cet article.
Une thématique qui ne concerne pas uniquement les spécialistes
Enfin, si la complexité de ce thème est liée au croisement de domaines professionnels (agriculture, restauration) et institutionnels (scolaire, hospitalier), il est important que, pour autant, il ne soit pas confisqué aux citoyens. Une fois informés, ils peuvent contribuer à sensibiliser les acteurs clés.
Si le changement dans ce domaine est particulièrement complexe, à l’image du système d’acteurs dans lequel il s’inscrit, chacun peut y jouer un rôle, aussi humble soit-il.
Pour aller plus loin :
- Ministère de l'Agriculture, de l'Alimentation et de la Forêt - "Guide de la restauration collective - favoriser proximité et qualité"
- BIO Ile de France – "Comment introduire durablement des produits biologiques dans un restaurant scolaire ? Guide d’accompagnement à l’attention des gestionnaires et des cuisiniers des collèges et des lycées d’Ile-de-France "
- Insee Premières – "Cinquante ans de consommation alimentaire : une croissance modérée, mais de profonds changements" - n°1568, octobre 2015
- Zéro Phyto 100% Bio – "Kit Collectivité : la transition vers le zéro phyto & le développement de la bio locale"